Négociations du Pacte sur la migration et l’asile

L’Union européenne et ses États membres sont confrontés aujourd’hui à un défi : divisés sur les enjeux migratoires depuis la crise migratoire de 2015-2016, vont-ils parvenir à surmonter ces divisions pour mieux coopérer et apporter une réponse commune aux personnes qui affluent aux frontières extérieures de l’Europe ? La commission des affaires européennes du Sénat a publié un rapport sur l’avancée des négociations du Pacte sur la migration et l’asile.

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Le fait migratoire, une réalité tangible pour l’Union européenne

L’Europe est aujourd’hui une destination importante des flux migratoires dans le monde. Près de 23 millions de ses habitants (soit 5,1 % de la population totale de l’Union européenne) sont des citoyens non-européens. Parmi ceux-ci, 8,7 millions travaillent sur le marché du travail des États membres de l’Union européenne.

Le contexte migratoire est actuellement troublé. On observe une reprise nette des flux migratoires irréguliers vers l’Union européenne (+64 % sur les 8 premiers mois de 2021 par rapport à 2020) et de nouveaux foyers de tensions migratoires aux portes de l’Europe (crise afghane ; frontière biélorusse ; crispations franco-britanniques sur les traversées de la Manche par des migrants)

Depuis une dizaine d’années, l’Union européenne et ses États membres, qui ont une compétence partagée en matière migratoire, font face à une « crise migratoire », qui a atteint son paroxysme en 2015-2016 avec la crise syrienne.

Celle-ci a eu des conséquences sur l’ensemble du Moyen-Orient, en particulier les voisins de la Syrie qui ont fait face à l’arrivée de réfugiés en nombre bien supérieur à ceux qui ont été accueillis en Europe. En Europe, ceci s’est traduit par des arrivées incontrôlées de migrants irréguliers fuyant certaines régions du monde pour rallier le continent européen.

Une crise migratoire révélatrice des insuffisances des politiques de migration et d’asile

En réalité, cette crise a agi comme un révélateur des insuffisances des politiques de migration et d’asile européennes. Elle a été surmontée par une plus grande coopération européenne entre les pays européens et entre l’Union européenne et ses voisins.

Mais la situation actuelle reste instable et témoigne d’une absence de coordination entre les États membres malgré les nombreux efforts qui ont permis depuis 20161 de renforcer le contrôle des frontières extérieures (entrée en vigueur du mandat élargi de l’agence Frontex, adoption du code frontières Schengen révisé ; institution d’un système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages).

Cette crise a en effet souligné les difficultés des États membres et de l’Union européenne à s’accorder sur un régime d’asile commun ou sur une politique de retours effective ainsi que la tentation du « chacun pour soi » face à des migrations aux caractéristiques très différentes suivant les pays.

Un nouveau pacte pour une gestion plus efficace et plus collective de la migration et de l’asile bloqué par les divisions européennes

Comme le constatait elle-même la Commission européenne, le 23 septembre 2020, « le système actuel ne fonctionne plus ». Présenté ce même jour, son projet de nouveau Pacte sur la migration et l’asile assume donc une « approche globale » qui vise à donner une cohérence aux efforts déployés pour le contrôle aux frontières, la migration et l’asile et à rétablir une confiance mutuelle au sein de l’Union européenne.

Cet ensemble de textes contraignants et d’orientations stratégiques révèle surtout les divisions persistantes entre acteurs du jeu institutionnels européen qui menacent l’adoption du Pacte.

Lors de sa présentation en septembre 2020, le Pacte sur la migration et l’asile avait été plutôt bien accueilli et l’ambition de la Commission européenne était de « boucler » un certain nombre de négociations dès la fin 2020. Toutefois, un an plus tard, selon le conseiller Justice Affaires intérieures à la représentation permanente de l’Espagne auprès de l’UE, les propositions du Pacte sont aujourd’hui « au réfrigérateur ». Son homologue français a confirmé qu’il y avait eu, depuis, non pas une vraie dynamique de négociation mais plutôt l’expression de « monologues et de lignes rouges » par les États membres.

Extrait du rapport

Au final, alors que la France doit prendre la présidence du Conseil au 1er janvier 2022, l’adoption du Pacte est très incertaine. La France souhaite donc poursuivre en priorité les négociations sur les dispositions législatives les plus consensuelles entre les États membres, en particulier Eurodac, en privilégiant une approche technique, et progresser autant que possible sur la dimension extérieure de la politique migratoire.

En savoir plus sur Philippe Bonnecarrère, Député du Tarn

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