PJL Climat : Zéro artificialisation nette

Pour limiter l’artificialisation des sols, la Convention citoyenne pour le climat a proposé des mesures fortes, reprises dans le projet de loi Climat et résilience. Ce dernier reprend l’objectif de diviser par deux le rythme d’artificialisation à l’horizon 2030. Que contient le texte à l’issue de son examen au Sénat ?

Définition opérationnelle de l’artificialisation

Le Sénat a largement retouché l’article 47 pour affirmer un principe d’application différenciée et territorialisée des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Il a ainsi rapproché la décision de l’échelon local et en permettant des adaptations en fonction des spécificités de chaque bassin de vie.

Il a également donné des définitions opérationnelles des sols artificialisés, de l’artificialisation nette et de la renaturation, qui permettront une prise en main immédiate par les acteurs et les élus locaux (article 48).

Les sénateurs ont complété la définition des sols artificialisés par une définition de la renaturation et de l’artificialisation nette. Le gouvernement proposait quant à lui de dissocier le processus d’artificialisation de l’objectif de « zéro artificialisation nette » dans les documents de planification et d’urbanisme en s’appuyant sur une approche bilancielle entre les surfaces terrestres nouvelles artificialisées et les surfaces désartificialisées et de renvoyer au décret la nomenclature des sols artificialisés.

Afin de rendre la définition de l’artificialisation des sols dans les documents d’urbanisme « plus ambitieuse et plus claire », le bien vague « principalement » est remplacé par « majoritairement ». Un sol dont au moins la moitié de la surface est imperméabilisée sera donc considéré comme artificialisé.

Le Sénat a en outre supprimé la mention qui précisait que les surfaces de pleine terre ne sont pas considérées comme artificialisées, qui risquait de compliquer, pour les collectivités locales, la conciliation des besoins en logements de leur territoire et l’impératif de lutte contre l’étalement urbain. ù

Il est également précisé que les friches sont considérées comme artificialisées, afin que les projets réalisés sur celles-ci ne soient pas pris en compte comme une artificialisation.

L’artificialisation résultant de projets d’envergure nationale ou régionale ne sera pas prise en compte dans l’évaluation de l’atteinte des objectifs de réduction de l’artificialisation de niveau local. Une façon de mutualiser la consommation foncière.

Déclinaison des objectifs dans les documents d’aménagement et d’urbanisme (article 49)

Largement retravaillé au Sénat, l’article 49 replace les SCoT au centre de l’application territorialisée et différenciée des objectifs de réduction de l’artificialisation, cantonnant les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) dans leur rôle d’orientation générale. Les ScoT pourront être en deçà des préconisations du Sraddet « dans un but d’intérêt général », par exemple pour construire du logement social ou relocaliser de l’activité, indique le rapporteur.

Le texte adopté précise aussi les différents éléments qui devront être conciliés lors de la fixation de ces objectifs à un échelon de proximité. Les sénateurs y ont ajouté en séance les enjeux de la ruralité, en particulier des projets de territoire des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens de la définition de l’Insee.

Cette répartition des efforts entre collectivités territoriales prendra également en compte les projets d’envergure nationale ou régionale, dont l’impact pourra ainsi être « neutralisé », et ce quel qu’en soit le maître d’ouvrage, public comme privé. Il est également prévu, contre l’avis du gouvernement, une mutualisation obligatoire au niveau régional des projets d’envergure nationale ou régionale. Le Sénat s’est ainsi assuré que les projets dont la portée dépasse le territoire ne pénalisent pas les communes qui les abritent.

Une dérogation est introduite  dans le décompte de l’artificialisation concernant l’installation de parcs photovoltaïques dans les espaces agricoles et naturels pour la période transitoire de dix ans prévue par le texte.

Et ce sous réserve de leur compatibilité avec l’exercice d’une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel ils sont implantés, qui en renvoie également les modalités de mise en oeuvre au décret. A l’issue de cette période de dix ans, la nomenclature des sols artificialisés prévue par l’article 48 devrait permettre de traiter le cas des installations d’énergie renouvelable.

Interdiction de nouvelles surfaces commerciales artificialisantes

Le texte issu de l’Assemblée posait le principe général d’interdiction de création de nouvelles grandes surfaces commerciales qui engendrerait l’artificialisation des sols, assortie toutefois de dérogations au cas par cas pour les projets inférieurs à 10.000 m2 de surface de vente.

En commission, le Sénat a notamment substitué la notion « d’emprise au sol » à celle de « surface de vente » – sans lien direct avec l’artificialisation dès lors que les surfaces de vente peuvent s’empiler au sein d’un même bâtiment de plusieurs étages –  et autorisé une extension par magasin, si l’emprise au sol de cette dernière est inférieure à 1.000 m2. Poursuivant sur cette ligne en séance, il a décidé d’intégrer les ensembles commerciaux parmi les installations de moins de 10.000 mètres carrés d’emprise au sol autorisées à déroger au moratoire sur les surfaces commerciales. L’objectif est d’autoriser la densification des centres commerciaux sans limite de surface en incitant à diminuer l’emprise au sol des parcs de stationnement.

La version du Sénat soumet aussi à les entrepôts principalement consacrés au commerce électronique à autorisation d’exploitation commerciale lorsque leur surface de plancher est supérieure à 5 000 mètres carrés et qu’ils ne sont pas situés sur une friche.

Enfin, est introduit dans le texte la possibilité pour toutes les communes, sans seuil d’habitants, de saisir la CDAC afin de statuer sur les projets de moins de 1 000 m2.


Quid des révisions de PLU / PLUI en cours ?

Pour les collectivités dont le PLU ou le PLUI est en cours d’élaboration ou de révision, il faudra d’abord que les SRADDET et SCoT soient révisés (ils ont jusqu’à cinq ans pour le faire).

Une fois les SRADDET et SCoT révisés, les PLU devront intégrer les objectifs en fonction de ce qu’ont retenu les SRADDET et SCoT.

En d’autres termes : il est conseillé aux communes de poursuivre la révision de leur PLU si celle-ci est en cours. Les modifications liées à la loi Climat seront intégrées lors d’une nouvelle modification ou élaboration.

En savoir plus sur Philippe Bonnecarrère, Député du Tarn

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