Colère au Sénat après la décision du Gouvernement de ne pas consulter le Parlement sur l’actualisation de la loi de programmation militaire pourtant prévue dans le texte en 2021. En lieu et place, le gouvernement a proposé aux députés et aux sénateurs un simple débat suivi d’un vote, en application de l’article 50-1 de la Constitution, qui n’engage pas sa responsabilité. Face à cette mise à l’écart, la Commission de la Défense a travaillé pendant 6 mois sur un rapport d’information pour définir le périmètre d’actualisation de la LPM, qui aurait dû faire l’objet d’un examen par le Parlement.
Un point d’étape légitime
D’une enveloppe globale de 295 milliards d’euros sur sept ans, la Loi de Programmation Militaire 2019-2025 prévoit une nette hausse du budget défense après des années de déflation.
Votée à la quasi-unanimité au Sénat en 2018, elle prévoit expressément qu’elle devait faire l’objet d’une actualisation courant 2021 afin de « vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés, les réalisations et les moyens consacrés », notamment en ce qui concerne la préparation opérationnelle et la disponibilité technique des équipements.
C’est donc en toute légitimité que la commission des affaires étrangères et de la défense a appelé le Gouvernement à déposer devant le Parlement un projet de loi d’actualisation de la LPM.
Les circonstances exceptionnelles, telles que la crise de la Covid-19 sur la situation macroéconomique et l’actualisation de la revue stratégique 2021 faisant état du renforcement de certaines menaces sur les intérêts de la France, plaidaient en la faveur d’une loi d’actualisation.
Les conséquences économiques de la crise sanitaire à l’origine des explications du Gouvernement
Selon le gouvernement, cette actualisation est prématurée. Le texte fixe un budget de la défense à hauteur de 2 % du PIB à l’horizon 2025. « Il se trouve qu’en raison de la récession, cet objectif est déjà atteint. Mais surtout et d’autre part, la longueur de la crise sanitaire, ses conséquences économiques […] ont changé les conditions de cette actualisation et donc les perspectives pour 2024 et 2025 », a déclaré le Premier ministre, Jean Castex devant les Sénateurs, tout en indiquant que cette actualisation devrait intervenir « dès que l’horizon économique et financier serait clarifié ».
Le travail de contrôle de la commission de la défense
Face à cette mise à l’écart des travaux d’actualisation de la LPM, la Commission de la Défense du Sénat a travaillé pendant 6 mois pour définir le périmètre d’actualisation, qui aurait dû faire l’objet d’un examen par le Parlement.
Dans ce rapport d’information, les Sénateurs ont estimé que ce périmètre d’actualisation est au minimum de 8,6 milliards d’euros, et non pas d’un milliard d’euros, comme l’affirmait le Gouvernement.
Ce montant recoupe 7,4 Mds € de surcoûts non prévus en LPM et plus de 1,2 Md € de surcoûts à prévoir pour atteindre les objectifs 2025 de préparation des forces.
Plusieurs programmes seront impactés : bâtiments de lutte anti-mines, bâtiment hydrographique, poids-lourds 4/6 tonnes, Eurodrone, véhicules blindés légers (VBL) régénérés, véhicules des forces spéciales… Quant au parc de Rafale, il ne comptera que 117 appareils en 2025, au lieu des 129 prévus.
Parallèlement, le déficit de médecins du SSA s’aggrave encore : il passe de 97 postes vacants en 2020 à 136 en 2021.