Aéroports de Paris : le RIP, bonne ou mauvaise idée ?

Aéroports de Paris : le RIP, bonne ou mauvaise idée ?

Le sujet surprend. Ce qui paraissait au départ pertinent peut se transformer en une impasse. Je fais partie des personnes favorables au référendum d’initiative partagée et désireuses de voir le seuil du nombre d’électeurs sérieusement abaissé. Je n’y vois pas de difficulté puisque le Parlement reste décideur comme évoqué plus haut.
Le sujet se complique avec l’exemple des aéroports de Paris. D’une part, c’est un projet de référendum qui ne trouve pas son origine dans une pétition ou une interpellation par la population. Il s’agit d’une initiative, du haut vers le bas, de groupes politiques qui ont participé aux débats parlementaires et qui ont été minoritaires. Ils font alors du RIP une sorte de voie d’appel de la décision du Parlement.

Si l’on imaginait que la procédure référendaire aille jusqu’au bout, nous serions très clairement dans une situation de tension entre la démocratie participative et la démocratie représentative.

Les choses se compliquent également du fait que dans ce cas assez exceptionnel la procédure de référendum a été engagée à la veille de la promulgation du texte (la loi PACTE).

Or, l’idée du RIP, pour éviter d’en faire un outil systématique d’appel des décisions du Parlement, était de ne pas pouvoir porter sur l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an. Il s’agissait en clair de ne pas recommencer le débat.

En considérant que le RIP est possible avant promulgation et que littéralement il n’y a pas dans ce cas de demande d’abrogation d’une disposition législative promulguée, le Conseil Constitutionnel va très loin puisqu’il permet un « appel » sur un texte qui n’est pas encore susceptible d’application.

Le gouvernement est à ce moment-là obligé d’attendre la fin de la procédure de RIP (que les signatures soient obtenues ou pas) pour pouvoir mettre en œuvre le texte. Si la pratique était systématisée, cela ouvrirait un risque de décalage dans l’application des textes qui pourrait poser de sérieux problèmes.

J’ajoute que si le RIP a été déposé la veille de la promulgation, c’est parce que le Conseil Constitutionnel a été saisi, ce qui est tout à fait normal, par plus de 60 sénateurs et ou 60 députés, d’une contestation sur le terrain de la constitutionnalité. Le Conseil Constitutionnel va dans quelques jours devoir se positionner sur la constitutionnalité ou non de la cession des actions détenues par l’État dans ADP alors qu’il aura déjà admis le RIP sur la même disposition.

Nous pourrions arriver à la situation ubuesque où le Conseil Constitutionnel retiendrait l’inconstitutionnalité du projet de cession d’ADP rendant alors caduc le RIP pourtant autorisé quelques quelques jours avant.

Quel que soit l’angle d’examen du sujet, on en arrive à la conclusion qu’il faut faire très attention avant de se lancer dans des mécanos constitutionnels. Je prends cette opération comme une leçon de modestie pour tous les parlementaires, et donc pour votre serviteur, avant l’examen au second semestre du nouveau projet de révision constitutionnelle que doit déposer le gouvernement.

En savoir plus sur Philippe Bonnecarrère, Député du Tarn

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