Vous avez toutes et tous pris connaissance de la volonté du Président de la République de réformer le droit du travail en recourant à la procédure des ordonnances. D’autres domaines pourraient être concernés.
Durant la campagne présidentielle, d’autres candidats avaient également annoncé leur souhait, s’ils étaient élus, de réformer par voie d’ordonnances.
Les parlementaires connaissent bien cette procédure, qui est de plus en plus courante. Entre 2004 et 2013, 357 ordonnances ont été publiées. Un nombre important concerne l’adoption de textes « techniques » dont les transpositions de directives européennes.
L’occasion de faire le point avec vous sur les principales caractéristiques de cette alternative à la procédure parlementaire « classique », puis sur les champs concernés par les ordonnances (à retrouver en fin d’article).
Déroger à la séparation des pouvoirs pour une adoption plus rapide des réformes
Concrètement, la procédure des ordonnances est encadrée par l’article 38 de la Constitution et permet par exception au Gouvernement de prendre, pendant un délai limité, des mesures qui relèvent normalement du domaine de la loi (donc de la compétence du Parlement) en vertu du principe de séparation des pouvoirs.
Le recours aux ordonnances présente deux avantages principaux pour le Gouvernement :
- aller plus vite que la procédure normale, qui prend entre dix et onze semaines pour la première lecture d’un texte au sein d’une chambre du Parlement ;
- conserver la « cohérence » d’un texte : il n’y a pas d’amendement, le texte final est le même que celui présenté par le gouvernement au début de la procédure.
Le Parlement maintient un rôle actif en deux temps
Le Parlement n’est pas pour autant absent de la procédure des ordonnances. Il intervient à deux reprises, dans le cadre des lois d’habilitation puis de ratification.
Première étape : le Parlement se prononce sur la loi dite « d’habilitation » du Gouvernement à légiférer par ordonnances. Ce texte spécifique suit la procédure législative « normale » et doit obligatoirement :
- préciser le(s) sujet(s) sur lesquels porteront les ordonnances ;
- fixer le délai pendant lequel le gouvernement peut prendre des ordonnances ;
- fixer le délai imparti au gouvernement pour déposer le projet de loi de ratification.
À ce stade, les parlementaires peuvent décider de refuser la loi d’habilitation. S’ils acceptent, le Gouvernement prend la main sur la rédaction et donc sur le contenu de l’ordonnance.
Deuxième étape : le Gouvernement soumet au vote du Parlement le projet de loi de ratification qui doit obligatoirement être déposé avant la date d’expiration fixée par la loi d’habilitation, sans quoi les ordonnances deviennent « caduques », c’est-à-dire que les mesures législatives qu’elles contiennent n’auront pas valeur de loi.
Le Parlement a le choix entre ratifier l’ensemble, ratifier une partie seulement ou refuser les ordonnances. Les ordonnances votées favorablement entrent immédiatement en vigueur.
Précisons que le Conseil constitutionnel conserve son pouvoir de contrôle ; 60 parlementaires peuvent le saisir pour qu’il se prononce sur la loi d’habilitation et celle de ratification.
Droit du travail : quels sont les domaines visés par les ordonnances ?
Je vous invite à consulter ici une petite note vous faisant le point sur le champ que devrait couvrir le projet de loi d’habilitation à réformer par ordonnances le droit du travail, présenté ce mardi 28 juin en Conseil des Ministres.